dimanche 16 janvier 2011

J'ai lu "Les ruines de Paris en 4908" d'Alfred Franklin

Attention au décalage horaire… Nous sommes en 4908. En février. L'Amiral baron Quésitor commande les forces maritimes calédoniennes dans les mers françaises. La première lettre de l’Amiral adressée à Nouméa à son Excellence Monsieur le Ministre de la Marine et des Colonies, raconte le premier contact avec une peuplade, une « tribu sauvage », des barbares « vêtus de peaux de bêtes » qui ont des « vices, des goûts, des travers, des aspirations qui sont en général le produit de civilisations raffinées. » Puis c’est la découverte des ruines de ce qui pourrait avoir été Paris.
Aussitôt une expédition archéologique est dépêchée sur place, ainsi qu’une « commission scientifique ». Nous suivons alors, toujours sous la forme de lettre, de rapports, d’échanges entre la mission et le gouvernement à Nouméa, les recherches et les travaux archéologiques.
C’est alors que le récit devient véritablement burlesque, anachronique, tourne au non sens. Imaginez que des archéologues découvrent l’Arc de triomphe en brossant des couches de gravats. Qu’ils découvrent au fur et à mesure des inscriptions, souvent abîmées. Des noms (Valmy, Marengo, Wagram…) et des plaques de rues. De quoi s’agit-il ? Quelle est cette « jeune fille maigre, frêle, délicate, revêtue d’une armure de fer, et coiffée d’une couronne de laurier, qui gît près d’une statue équestre renversée ? Que veut-dire cette expression « République française – Pucelle d’Orléans » ? A quoi servait ce grand bâtiment dont les étages supérieurs se sont effondrés, mais dont les salles remplies de statues semblent être dédiées à « Marie du Louvre » ? Les hypothèses des scientifiques, bardés de livres et de certitudes, sont pour la plupart délirantes, pour nous qui savons. Mais quand on ne sait pas ? Comment des archéologues et divers scientifiques peuvent-ils se laisser abuser par des inscriptions effacées ? Comment peuvent-ils se tromper dans l’interprétation de ce qu’ils découvrent ? Autrement dit : découvrir une partie des choses peut-l entrainer à croire, voire à inventer tout autre chose que la réalité de l’époque.
Dernière conséquences : faut-il laisser les membres d’une expédition fréquenter les indigènes ? Surtout quand les « barbares » sont les lointains descendants d’un peuple qui autrefois était à la pointe de la civilisation ? « Un spectacle navrant s’offrit à nos yeux. Mêlés aux indigènes, ils (les hommes de l’expédition) riaient, chantaient, fumaient leur pipe, se passaient de main en main des bouteilles, qu’une fois vidées, ils lançaient au loin. »
Un livre absolument nécessaire. A lire, à méditer. Pour éviter de faire, plus tard, les mêmes erreurs ? Éclats de rire garantis.

Les premières lignes : « En vue de Paris, le 3 février 4908. Monsieur le Ministre, La flottille d’exploration dont votre Excellence a bien voulu me donner le commandement a accompli la première partie de sa tache. Si, comme le veut la tradition, Nouméa doit son origine à une colonie parisienne, j’ai retrouvé le berceau de nos ancêtres. J’ai retrouvé la plus belle, la plus riche, la plus célèbre, la plus somptueuse ville du vieux monde, car c’est en vue des ruines de Paris que j’écris cette dépêche. »

Alfred FRANKLIN – Les ruines de Paris en 4908
Avant-propos d’Eric Dussert
Illustrations d’Amandine Urruty
Éditions de l’Arbre vengeur 2008.

Informations sur le site
http://www.arbre-vengeur.fr/?p=956#more-956
On peut même feuilleter quelques pages du livre.

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